Tout ou presque tout doit désormais être évalué et, en l’espèce, la France aurait du retard. Mais la néo évaluation envahissante va bien au delà de l’évaluation ordinaire. Partant de l’hypothèse d’une unité organique et problématique de cet essaimage récent, la contribution présente différentes critiques faites aux nouvelles normes d’évaluation dans la sphère publique, à tous les niveaux, de la conception à la mise en œuvre. Si l’évaluation n’est pas un bien en soi, entraînant un imaginaire quasi religieux, l’auteur soutient qu’il faut alors la considérer comme un fait social daté, étrange et complexe, parmi d’autres innovations « modernisatrices », et chercher à caractériser les pratiques qui s’y réfèrent. La néo évaluation ne transformant pas que l’art de gouverner mais aussi les cadres du travail prescrit et subordonné, ainsi que la relation subjective de chacun à son métier, il aborde ensuite les rapports sociaux triangulaires évaluateurs/évalués/usagers engendrés par la généralisation de cette obligation et la multiplication des interventions de ce type. Enfin, vu la bascule des valeurs organiques du service public à celles concurrentielles de la société de marché, il examine l’hypothèse de l’installation d’une magistrature technique extérieure aux pratiques, destructrice des métiers et entraînant des effets de surnormativité, de harcèlement social mais aussi de servitude volontaire.
SOMMAIRE
L’évaluation ou les évaluations ? Questions de contexte
Configuration d’acteurs et destination des évaluations
Entre pouvoir et savoir, entre densification normative et servitude volontaire