Cet article s’interroge sur ce qu’il en est, en France, depuis les années 1990 des « pratiques croisées » du droit et de l’évaluation dans la mise en œuvre de l’action publique. C’est que, depuis une vingtaine d’années, le droit des politiques publiques est en train d’opérer un changement d’identité auquel les développements du management public ne sont pas étrangers, tandis que les pratiques évaluatives sont entrées dans leur phase d’institutionnalisation. Avant tout examen des éventuels rapports qui se nouent entre le droit et l’évaluation, ce sont les conditions même de la possibilité d’un tel exercice qui sont évoquées. Une fois ce travail préalable accompli, la réflexion se porte sur les chassés-croisés qui s’opèrent entre les deux démarches : celle du juriste et celle de l’évaluateur. L’article décrit tout à la fois ce que le droit donne à voir de l’évaluation (elle a vu son statut se construire dans l’écriture juridique) et ce que celle-ci donne à voir du droit, lequel devient à son tour production évaluable. Au bout du compte, on assiste à une redistribution des rôles dans la conduite de l’action publique : s’il faut aux juristes se faire de plus en plus évaluateurs, les évaluateurs doivent, de leur côté, emprunter aux juristes une part de leur identité.
SOMMAIRE
Dans quelles limites les rapports entre le droit et l’évaluation sont-ils analysables ?
L’examen des relations entre le droit et l’évaluation est-il justifié ?
Dans quelles conditions une lecture croisée des activités juridiques et des pratiques évaluatives est-elle envisageable ?
Rationalité du droit et rationalité de l’évaluation
Droit et évaluation : quels chassés-croisés ?
Ce que le droit donne à voir de l’évaluation
Ce que l’évaluation donne à voir du droit